۷ۚۧŰčŰ© ۧÙۚ۱ÙŰŻ ۧÙŰ„ÙÙŰȘ۱ÙÙÙ Ű§ÙŰȘÙۧ۔ÙÙ Ùێ۱ ŰšŰȘۧ۱ÙŰź 17 ŰŰČÙ۱ۧÙ/ÙÙÙÙÙ 2022 La reprise des relations entre lâEspagne et le Maroc, consacrĂ©e par la visite de Pedro Sanchez Ă Rabat en avril, pourrait relancer le projet de construction dâun tunnel ferroviaire dans le dĂ©troit de Gibraltar, sur lequel travaillent les deux pays depuis des dĂ©cennies. La normalisation des relations entre les deux pays pourrait permettre Ă ce projet qui date des annĂ©es 70 de prendre corps et dâoffrir une liaison fixe par le dĂ©troit de Gibraltar ». Le coĂ»t important du projet avait Ă©tĂ© un obstacle Ă sa rĂ©alisation, rappelle Ă La Razon, Jawad Kerdoudi, prĂ©sident de lâInstitut marocain des relations internationales, soulignant que la Banque mondiale, la Banque europĂ©enne dâinvestissement, des fonds arabes ou le Fonds africain de dĂ©veloppement Ă©taient prĂȘts Ă soutenir ce projet. La viabilitĂ© du projet pourrait aussi favoriser lâutilisation du tunnel comme gazoduc entre le Maroc et lâEspagne, afin de permettre le transport du gaz dans les deux sens », ajoute lâexpert qui insiste sur le fait que la zone de rĂ©alisation du projet dans le dĂ©troit de Gibraltar est particuliĂšre en raison de sa proximitĂ© avec trois grands ports AlgĂ©siras, Tanger et Tanger Med et deux ports de taille moyenne Cadix et Ceuta. Une chose est sĂ»re, le projet reste dâactualitĂ©, dâautant que les deux pays ont exprimĂ© leur volontĂ© de travailler ensemble pour son dĂ©veloppement en mettant sur pied un comitĂ© mixte hispano-marocain et deux sociĂ©tĂ©s dâĂ©tudes la SociĂ©tĂ© espagnole pour les communications fixes Ă travers le dĂ©troit de Gibraltar SECEGSA en Espagne, et la SociĂ©tĂ© nationale dâĂ©tudes du DĂ©troit de Gibraltar SNED au Maroc. Le ComitĂ© mixte, composĂ© de dix membres 5 espagnols et 5 marocains, se rĂ©unit au moins une fois par semestre, en Espagne ou au Maroc. Au niveau transcontinental, le tunnel aurait un impact considĂ©rable sur les relations commerciales entre lâEurope et lâAfrique, favorisant un meilleur trafic de marchandises, une plus grande productivitĂ© des entreprises et la dĂ©localisation et la crĂ©ation dâentreprises. Le tunnel pourrait voir le jour en 2030-2040. Il sâĂ©tendra sur 42 km, dont 27,7 en sous-marin et 11 en souterrain 38,67 km au total, entre la pointe de Paloma Ă Tarifa, et la pointe de Malabata, dans la baie de Tanger, avec une profondeur maximale de 300 mĂštres. bladi
Leport a en effet été construit à 40 kilomÚtres de Tanger, sur le détroit de Gibraltar, la deuxiÚme voie maritime la plus fréquentée au monde. Il est en lien chaque semaine avec 174 ports
Navires au mouillage face Ă lâenclave britannique de Gibraltar Nora MareĂŻ, juillet 2010. 1Depuis toujours, le dĂ©troit de Gibraltar est un espace observĂ© et convoitĂ©, dont les fonctions ont Ă©voluĂ© Ă chaque Ă©poque de lâhistoire. Lâouverture du canal de Suez, en 1869, a cependant accĂ©lĂ©rĂ© son destin. Il devient le goulet majeur des routes maritimes en provenance dâAsie. La grande route impĂ©riale des Indes, celle du pĂ©trole arabo-persique, ou encore celle des produits manufacturĂ©s asiatiques passent systĂ©matiquement par Suez et donc Gibraltar pour les Ă©changes entre lâEurope et lâAsie Charlier, 1990 ; Guillaume, 1999 ; Marcadon, 2004. Il nâest alors pas nouveau de parler de mondialisation en ce qui concerne le dĂ©troit de Gibraltar. Toutefois, son rĂŽle Ă©volue rapidement depuis la fin des annĂ©es 1980. Il a ainsi Ă©tĂ© placĂ© sur lâĂ©chiquier maritimo-portuaire contemporain par lâamateur danois Maersk. Ce dernier, Ă lâorigine de changements structuraux dans les logiques du transport maritime conteneurisĂ©, a choisi comme port pivot Ă lâĂ©chelle mondiale le port dâAlgeciras sur le dĂ©troit de Gibraltar. Il place ainsi le dĂ©troit au cĆur des restructurations du transport maritime mondial et en fait un observatoire des changements VigariĂ©, 1995 ; Guillaume, 2005 ; FrĂ©mont, 2007. 2MalgrĂ© ce rĂŽle grandissant sur la scĂšne maritime mondiale, les rĂ©gions frontaliĂšres du dĂ©troit de Gibraltar, lâAndalousie dâun cĂŽtĂ©, le TangĂ©rois de lâautre, sont des rĂ©gions pauvres et Ă la pĂ©riphĂ©rie des centres Ă©conomiques de leur pays respectif. Par lâĂ©mergence dâune dynamique portuaire conquĂ©rante, elles ont pourtant rĂ©ussi Ă sâaccrocher aux flux mondiaux passant quotidiennement Ă leurs pieds. Dans quelle mesure, cet arrimage aux grands flux maritimes circumterrestres influence-t-il le dĂ©veloppement des territoires de rivage ? 3En proposant un regard global sur cet espace terraquĂ©, lâobjectif de lâarticle est dâanalyser les enjeux territoriaux dâun espace qui semble plus animĂ© par la mer qui se trouve en son centre que par ses rivages. La premiĂšre partie Ă©voque la maniĂšre dont ce passage maritime international est devenu une plaque tournante de la mondialisation des Ă©changes. Ensuite, un retour Ă une Ă©chelle plus locale permet de rĂ©vĂ©ler les risques de ruptures spatiales engendrĂ©s par cet arrimage mondial. Enfin, dans une rĂ©flexion sur les solutions Ă apporter Ă cette dĂ©sarticulation entre un systĂšme mondialisĂ© et des marges qui peinent Ă en profiter, la perspective dâune gestion commune des rives du dĂ©troit est envisagĂ©e. Illustration 1 - Localisation des ports du dĂ©troit et des activitĂ©s pĂ©ri-portuaires Source Nora MareĂŻ, 2008. Le dĂ©troit de Gibraltar, une plaque tournante pour la mondialisation des Ă©changes 4Sans ĂȘtre Ă la tĂȘte d'une zone de production internationale ou de consommation de masse, il est rare quâun espace maritime devienne un lieu dâescale pour les grands navires de la flotte mondiale. Pourtant sur le dĂ©troit de Gibraltar, la spĂ©cialisation dans le stockage et la redistribution des conteneurs Ă lâĂ©chelle internationale, associĂ©e Ă une forte activitĂ© de ravitaillement des navires, ne sont pas loin dâen faire une aire dâarrĂȘt incontournable sur la grande autoroute maritime Est-Ouest. Le dĂ©troit de Gibraltar devient un espace original oĂč se croisent le dense trafic marchand alimentant les Ă©changes entre Europe et Asie, et une circulation humaine de plus en plus intense, rĂ©vĂ©latrice des liens historiques entre lâEurope et lâAfrique. Lâensemble de ces flux hisse le dĂ©troit de Gibraltar au rang des dĂ©troits du Pas de Calais ou de Malacca en termes de trafic maritime international 97 000 Ă 100 000 navires par an et la nature de ces flux en fait un espace observatoire de la mondialisation des Ă©changes. Une plate-forme multisite dâĂ©clatement des conteneurs 5En Ă peine dix ans, la situation monopolistique du port dâAlgeciras pour les trafics conteneurisĂ©s a Ă©tĂ© bouleversĂ©e par lâarrivĂ©e dâun concurrent de poids sur lâautre rive, le port marocain de Tanger-Med, et par une situation de saturation des infrastructures du port andalou. 1 Lâensemble des trafics portuaires sont donnĂ©es par les autoritĂ©s portuaires. Il existe des chiffre ... 6Sous lâimpulsion du gĂ©nĂ©ral Franco et de sa politique de dĂ©veloppement de pĂŽles industriels en 1965, le petit port dâAlgeciras devient un port dâintĂ©rĂȘt national. La localisation de ce nouveau pĂŽle industriel est Ă©vidente, face Ă Gibraltar, le gouvernement franquiste Ă©tale raffineries, sidĂ©rurgies et centrales Ă©lectriques. Le fond de la baie dâAlgeciras devient une vĂ©ritable zone industrialo-portuaire ZIP dont les effets se font sentir encore aujourdâhui puisque une part importante des trafics du port est Ă imputer aux vracs liquides 39 % et aux vracs secs 5 %. Pourtant, ce ne sont pas les effets de cette industrialisation lourde qui sont les plus Ă©tonnants. Les dĂ©cisions prises durant les deux dĂ©cennies suivantes vont bouleverser le sort du port espagnol. En effet, lâarrivĂ©e de lâarmement Sealand en 1975, puis de Maersk en 1986, vont faire dâAlgeciras lâun des premiers ports europĂ©ens de la conteneurisation. DĂšs lors, le trafic conteneur ne cesse de croĂźtre et le port dâAlgeciras, dotĂ© en services et infrastructures spĂ©cialisĂ©es apportĂ©s par les opĂ©rateurs, sâimpose en Espagne, en Europe et en MĂ©diterranĂ©e. ExprimĂ© en nombre de conteneurs Ă©quivalent vingt pieds EVP, son trafic le situe au cinquiĂšme rang europĂ©en en 2007 prĂšs de 3,3 millions dâEVP ; il talonne, parfois surpasse, Gioia Tauro Ă la tĂȘte des trafics mĂ©diterranĂ©ens ; et se hisse au premier rang espagnol devant Valence 2,4 millions dâEVP et Barcelone prĂšs de 2,1 millions dâEVP1. Ce dĂ©veloppement portuaire est visible par des extensions spectaculaires de terminaux avançant dans la baie le terminal Juan Carlos I 69 ha dĂ©diĂ© Ă Maersk ; et les extensions de Isla Verde Exterior 121 ha, dont les premiers quais ont ouvert durant lâĂ©tĂ© 2010, et qui ont vu lâarrivĂ©e de lâarmement corĂ©en Hanjin. MalgrĂ© cet imposant dĂ©ploiement, le port est proche de la saturation. 7Presque quarante ans plus tard, un scĂ©nario semblable se produit sur lâautre rive du dĂ©troit. Le Roi du Maroc annonce Ă lâoccasion du discours du trĂŽne, le 30 juillet 2002, le lancement dâune opĂ©ration dâamĂ©nagement dâenvergure Ă 40 km Ă lâest de Tanger. Il sâagit de construire ex nihilo un port en eau profonde, structurĂ© principalement autour de terminaux Ă conteneurs. Chacun de ces terminaux a trouvĂ© rapidement son concessionnaire, de sorte que les travaux de la premiĂšre phase, dĂ©marrĂ©s en 2003, ont permis de faire tourner les deux premiers terminaux en 2007. LâopĂ©rateur Maersk, Ă travers sa filiale APM Terminals y a vu une aubaine afin de consolider sa position sur le dĂ©troit. Au regard des 2 millions dâEVP enregistrĂ©s en 2010, lâinitiative semble couronnĂ©e de succĂšs. Une zone stratĂ©gique pour le premier opĂ©rateur mondial 8Tanger-Med et Algeciras sont des ports similaires, Ă classer dans la catĂ©gorie des hubs c'est-Ă -dire des plates-formes dâaccueil et de redistribution des conteneurs Ă une Ă©chelle qui peut ĂȘtre rĂ©gionale ou internationale. Ils sont caractĂ©risĂ©s par un taux de transbordement extrĂȘmement Ă©levĂ© plus de 85 % pour le port dâAlgeciras et prĂšs de 96 % pour le port de Tanger-Med. Ce taux Ă©voque en quelque sorte le trafic perdu pour lâarriĂšre-pays et permet de les dĂ©crire comme de simples lieux de triage des boĂźtes » afin de les transfĂ©rer dâune ligne Ă lâautre. Pourtant, cette fonction les place au cĆur des rĂ©seaux maritimes des plus grands opĂ©rateurs mondiaux. Illustration 2 - RĂ©seau secondaire lignes feeders de lâarmateur Maersk en MĂ©diterranĂ©e au dĂ©part de ses trois hubs janvier, 2011 Source Services feeders ; rĂ©alisation N. MareĂŻ, 2011. 9Les stratĂ©gies de Maersk en MĂ©diterranĂ©e sont rĂ©vĂ©latrices de lâimportance dâun hub dans le rĂ©seau maritime dâun transporteur conteneurisĂ©. Le premier opĂ©rateur mondial a incontestablement un avantage en MĂ©diterranĂ©e par un investissement sur trois passages maritimes le binĂŽme Algeciras/Tanger-Med sur le dĂ©troit de Gibraltar, Gioia Tauro sur le dĂ©troit de Messine et Port-SaĂŻd sur le canal de Suez. Ce systĂšme permet une couverture complĂšte de la zone mĂ©diterranĂ©enne grĂące Ă la mise en place dâun systĂšme en hub and spokes. En effet, les hubs sont placĂ©s au plus prĂšs de la grande route maritime Est-Ouest, la localisation sur les passages internationaux est alors idĂ©ale. A partir dâun hub la multiplication des liaisons en arborescences feeders permet de multiplier les destinations finales illustration 2. Cette logique rĂ©ticulaire permet aux porte-conteneurs gĂ©ants dâĂ©viter de dĂ©vier de lâaxe Est-Ouest et donc dâeffectuer des rotations plus importantes sur cet axe, tout en augmentant la zone de desserte grĂące au rĂ©seau secondaire. Cette pratique du hub and spokes, lĂ©gitimĂ©epar les Ă©conomies dâĂ©chelle quâelle permet et les succĂšs dâopĂ©rateur comme Maersk, marque un changement dâĂ©poque dans le processus de restructuration du transport maritime mondial et dans la fonction portuaire. Ces activitĂ©s deviennent de plus en plus enchaĂźnĂ©es aux logiques de la logistique internationale Ducruet, 2005 ; FrĂ©mont, 1996. Une station de service de la mondialisation 10Aux croisĂ©es des routes maritimes internationales, le dĂ©troit de Gibraltar est devenu la premiĂšre zone mĂ©diterranĂ©enne pour lâapprovisionnement des navires en fuel IFO, gas-oil MGO et huile marine MDO. Dâune maniĂšre gĂ©nĂ©rale, de nombreux ports proposent ce genre de services, mais le soutage ou bunkering Ă gros volumes nâest possible que dans une poignĂ©e de zones prĂ©sentant une situation gĂ©ographique Ă proximitĂ© des grandes routes maritimes, des installations nĂ©cessaires dâaccueil des navires et des services complĂ©mentaires comme la rĂ©paration navale et lâapprovisionnement en eaux et en vivres Castillo Manzano, 2001. 2 Isemar / Le Marin, 6-06-08. 11Les ports du dĂ©troit ont livrĂ© 7,96 Mt de soutes en 2007 4,3 par Gibraltar ; 3,1 par Algeciras dont la moitiĂ© est destinĂ©e aux navires de Maersk qui frĂ©quentent le terminal Juan Carlos I ; 560 000 t par Ceuta ; et les capacitĂ©s de soutage de Tanger-Med sont Ă venir. Ces chiffes restent modestes comparĂ©s aux grandes stations de soutage que sont Singapour 32 Mt en 2007, Fujairah dans le golfe Persique 16 Mt ou Rotterdam 13,6 Mt2, mĂȘme si lâactivitĂ© a connu un essor considĂ©rable puisquâen 1990 seulement 800 000 tonnes de soutes Ă©taient livrĂ©es par les ports du dĂ©troit. LâactivitĂ© est favorisĂ©e par la possibilitĂ© de soutage sans contraintes de tirant dâeau et les opĂ©rations peuvent ĂȘtre rĂ©alisĂ©es Ă quai ou en mer par une flotte locale de petits tankers. Le bunkering est nĂ©anmoins extrĂȘmement dĂ©criĂ© par les associations de protection de lâenvironnement au nom des risques quâil engendre pour lâenvironnement cĂŽtier et marin du dĂ©troit. Un lieu incontournable de la traversĂ©e Europe-Afrique 3 A titre indicatif, 13 millions de passagers ont traversĂ© le dĂ©troit du Pas de Calais en 2010 dove ... 12Lâintense flux marchand de lâartĂšre maritime Est-Ouest est entrecoupĂ© par un trafic Nord-Sud qui nâa cessĂ© de prendre de lâampleur au cours du XXe s. Il sâagit dâune part, dâun courant marchand support dâune partie du commerce extĂ©rieur marocain avec lâEurope et dâautre part, dâun flux humain de plus de 5 millions de passagers dont 40 % traversent le dĂ©troit lors de la pĂ©riode estivale3 illustration 3. Les protagonistes de ce grand va-et-vient saisonnier sont en majoritĂ© des marocains vivants en Europe qui vont tels des fourmis », les galeries et remorques de voiture chargĂ©es Ă ras bord, passer un moment dans leur pays dâorigine Tarrius, 1992, Arab, 2009. 13Au dĂ©part de SĂšte en France, de GĂȘnes ou Livourne en Italie, de Barcelone, Almeria, Malaga et Algeciras en Espagne, ils embarquent Ă bord dâun ferry Ă destination du nord du Maroc. En 2011, une flotte de 31 ferries est opĂ©rationnelle sur ces lignes. Dâun opĂ©rateur Ă lâautre les critĂšres de confort et de modernisme peuvent diffĂ©rer sensiblement. Matthew Murtland 2011 met en exergue la qualitĂ© mĂ©diocre des ferries marocains. Cette idĂ©e est confirmĂ©e par lâĂąge moyen de la flotte des opĂ©rateurs marocains du dĂ©troit, IMTC et Comarit, dont les navires affichent respectivement des moyennes dâĂąge de 35 et 31 ans alors que ceux de FRS, Acciona Trasmediterranea et Balearia, les opĂ©rateurs espagnols, ont quant Ă eux des moyennes dâĂąge de 17, 16 et 10 ans. Ce dĂ©calage qui existe entre une flotte vieillissante et un marchĂ© en expansion peut sâexpliquer, entre autres, par le caractĂšre extrĂȘmement saisonnier de cette mobilitĂ© massive. Illustration 3 - Trafics passagers des ports du dĂ©troit et de la mer dâAlboran en 2007 Nora MareĂŻ. Du mondial au local, un espace dĂ©sarticulĂ© 14Le dĂ©troit de Gibraltar est un espace oĂč les circulations humaines et marchandes sont les principales animatrices des territoires. Elles dynamisent les lieux et rythment lâinvestissement qui consiste au dĂ©veloppement dâune nouvelle offre de transport afin dâaccueillir des flux en augmentation continue. Par la mise en place de ces infrastructures, principalement portuaires, lâobjectif recherchĂ© est de sâaccrocher aux flux mondiaux ; la gestion de ces flux devrait permettre de crĂ©er de lâargent et dâimpulser du dĂ©veloppement. Dâune rive Ă lâautre, les prises de dĂ©cisions Ă©tablissent alors lâinfrastructure comme lâinstrument essentiel du dĂ©veloppement territorial projetant ainsi les territoires dans le mythe politique des effets structurants des infrastructures de transport Offner, 1993. Cependant, la trop forte mise sur un dĂ©veloppement capitalistique et Ă©conomique comporte un risque de dysfonctionnement et de dĂ©sarticulation spatiale sur un espace littoral sinistrĂ© dâun point de vue socio-Ă©conomique et fragile dâun point de vue environnemental. La construction dâun espace oĂč les intĂ©rĂȘts extraterritoriaux priment OpĂ©rateurs maritimes et dynamisme portuaire 15Lâinsertion des ports du dĂ©troit dans les principaux rĂ©seaux conteneurisĂ©s de la planĂšte a comme consĂ©quence une appropriation complĂšte du dynamisme portuaire par des intĂ©rĂȘts extraterritoriaux, en particulier ceux des plus grands opĂ©rateurs mondiaux du transport maritime Maersk, 1er armateur mondial en 2011 ; CMA-CGM, 3e ; Hanjin Shipping, 9e. Sâils participent Ă la construction des infrastructures portuaires de derniĂšre gĂ©nĂ©ration, leur intĂ©rĂȘt, en tant que transporteur, est donc essentiellement de dĂ©velopper leur activitĂ© vers les avant-pays marins. Il est donc peu probable que ces opĂ©rateurs amĂšnent des possibilitĂ©s importantes dâenracinement territorial et ceci est dâautant plus vrai que le port concernĂ© est un hub. En effet, la valeur ajoutĂ©e de la fonction portuaire est trĂšs dĂ©pendante du type de trafic, et les conteneurs ne sont pas Ă ranger parmi les trafics les plus intĂ©ressants de ce point de vue. En particulier, lâactivitĂ© de transbordement est en gĂ©nĂ©ral peu inductrice de valeur ajoutĂ©e locale, elle emploie une faible main-d'Ćuvre et elle peut ĂȘtre trĂšs vulnĂ©rable en cas de forte concurrence. Les autoritĂ©s portuaires qui arrivent Ă bĂ©nĂ©ficier de belles plus-values sont celles qui ont dĂ©veloppĂ© un fort potentiel industriel et logistique pĂ©ri-portuaire en investissant, par exemple, dans des zones dâactivitĂ© spĂ©cialisĂ©es et extrĂȘmement bien connectĂ©es Ă leur arriĂšre-pays. En ce qui concerne lâautoritĂ© portuaire dâAlgeciras, la prise en compte de ces principes de massification des trafics est trĂšs rĂ©cente et les moyens mis en Ćuvre pour y arriver sont encore balbutiants. Tanger-Med, le modĂšle du dĂ©veloppement asiatique importĂ© en MĂ©diterranĂ©e 16A Tanger Med, la donne est dâemblĂ©e diffĂ©rente car le projet est prĂ©sentĂ© comme une proposition globale dâamĂ©nagement de la rĂ©gion du TangĂ©rois. Il est confiĂ© Ă une agence publique créée en 2002, lâAgence SpĂ©ciale Tanger MĂ©diterranĂ©e TSMA dont les compĂ©tences sont portuaires mais Ă©galement terrestres puisquâelle est dĂ©signĂ©e comme lâamĂ©nageur de la Zone SpĂ©ciale de DĂ©veloppement ZSD créée pour accompagner le projet. Cependant, comme Ă Algeciras, la concession des terminaux est dĂ©volue Ă des sociĂ©tĂ©s privĂ©es Maersk et CMA-CGM ont remportĂ© les plus importantes concessions, Tanger Med sâinscrivant dans une rĂ©forme radicale du systĂšme portuaire marocain. Si la concession des terminaux conteneurs reste au cĆur du projet, lâoriginalitĂ© est Ă observer dans la crĂ©ation de cette ZSD qui consiste en la mise en place de zones d'activitĂ©s intĂ©grĂ©es et de zones franches logistique, commerciale et industrielle comme celle de Melloussa 600 ha, orientĂ©e vers les activitĂ©s d'exportation et qui accueillera Renault sur 300 ha en 2012. 17MĂȘme si le projet a rencontrĂ© quelques succĂšs commerciaux grĂące Ă lâarrivĂ©e de nouveaux investisseurs au Maroc, le principe mĂȘme de zones franches interpelle quant Ă ses effets sur le dĂ©veloppement des territoires. En effet, les avantages dâune telle zone sont liĂ©s Ă des lĂ©gislations fiscales extrĂȘmement permissives pas de droits de douane, pas de TVA, pas dâimpĂŽts sur les sociĂ©tĂ©s pendant cinq ans, rapatriement de capitaux en devises Ă©trangĂšres, etc.. Ce sont des zones qui fonctionnent donc de maniĂšre isolĂ©e par rapport Ă leur espace dâaccueil. Les spĂ©cialistes du bureau international du travail BIT reconnaissent la difficultĂ© dâĂ©valuer la contribution de ces zones dĂ©fiscalisĂ©es au dĂ©veloppement socio-Ă©conomique, tout en relevant leurs rĂ©sultats sur lâemploi, la diversification du tissu Ă©conomique, et lâattraction des investissements Ă©trangers. Dans cette perspective, lâobjectif de faire de la ZSD une zone atelier, place alors les responsables marocains dans une optique complĂštement diffĂ©rente de celle dâAlgeciras. Lâappel Ă lâinvestissement Ă©tranger et la mise en place dâune industrie de main-dâĆuvre Ă vocation exportatrice comme lâassemblage automobile sont alors prĂ©sentĂ©s comme les clefs du dĂ©veloppement de la rĂ©gion. De telles entreprises ont connu quelques succĂšs en particulier en Asie Chine, Singapour, Malaisie. Cependant pour de nombreuses zones de ce genre, il est difficile de sortir du cercle vicieux dâune production Ă faible valeur ajoutĂ©e et sans montĂ©e en gamme, les effets sur le dĂ©veloppement ne vont guĂšre plus loin que la crĂ©ation de quelques emplois sous-qualifiĂ©s BIT, 2003 ; Bost, 2007. 18Ainsi, dans un cas comme dans lâautre, les choix politiques en termes dâamĂ©nagements portuaires et pĂ©ri-portuaires semblent loin de lâenracinement territorial tant souhaitĂ© sur ces espaces oĂč les besoins socio-Ă©conomiques sont Ă©normes. Dâailleurs, de maniĂšre assez symptomatique, le commerce extĂ©rieur marocain nâest responsable Ă Tanger Med que de 46 228 EVP en 2009, soit moins de 4 % du trafic global du hub. Une dĂ©gradation sensible de lâenvironnement marin et cĂŽtier du dĂ©troit 19Lâintensification de lâactivitĂ© humaine sur les littoraux peut ĂȘtre source de tensions sur les espaces marins et cĂŽtiers environnants, en particulier lorsquâil sâagit de dĂ©velopper des infrastructures lourdes et dĂ©voreuses dâespace, telles les zones portuaires et industrielles. Un port performant est un port prĂ©sentant des profondeurs suffisantes afin dâaccueillir les plus gros navires de la flotte mondiale et des espaces de stockage consĂ©quents pour hĂ©berger, entre autres, les milliers de conteneurs en attente de transbordement ou dâĂ©vacuation vers lâarriĂšre-pays. Pour rĂ©pondre Ă ces critĂšres physiques de performance, sur les cĂŽtes escarpĂ©es du dĂ©troit de Gibraltar, les ports ont Ă©tĂ© construits par remblaiement sur les plus grandes baies existantes et par extension de ces remblais en mer. Dans la baie dâAlgeciras, 610 hectares ont Ă©tĂ© gagnĂ©s sur la baie en un siĂšcle et le mouvement de remblaiement nâest pas achevĂ© port dâAlgeciras et de Gibraltar. Sur le site de lâOued RâMel oĂč a Ă©tĂ© construit Tanger-Med, la phase 1 du projet Ă consister Ă construire une centaine dâhectares de terminaux portuaires intĂ©gralement gagnĂ©s sur la mer illustration 4. Ces constructions lourdes sont responsables de perturbations importantes dans le dynamisme morpho-sĂ©dimentaire des plages du dĂ©troit Ă©rosion au point que plusieurs campagnes de rechargement en sable des plages de la baie dâAlgeciras ont Ă©tĂ© menĂ©es ces derniĂšres annĂ©es. Il faut ajouter Ă ces remblaiements strictement cĂŽtiers ceux des zones rĂ©tro-littorales correspondant aux zones dâactivitĂ©s Ă©conomiques ou logistiques et qui participent alors Ă lâimpermĂ©abilisation des sols dans des zones soumises Ă de fortes intempĂ©ries hivernales. Illustration 4 â Evolution diachronique des infrastructures portuaires de Tanger-Med Source TMSA, images Google Earth ; rĂ©alisation N. MareĂŻ. 20Outre ces dĂ©sĂ©quilibres les plus visibles, il ne faut pas omettre les risques liĂ©s Ă la fonction de zone de transit et dâescale internationale pour une grande partie de la flotte mondiale. Les accidents maritimes ne sont pas rares dans le dĂ©troit et leurs effets sont souvent amplifiĂ©s par le mauvais temps et la lenteur dâintervention dans des eaux sans souverainetĂ© officielle. Le 12 aoĂ»t 2007, le vraquier panamĂ©en New Flame a heurtĂ© le pĂ©trolier danois Torm Gertrud alors quâil sortait du port de Gibraltar. Ă la suite de cette collision, le cargo New Flame s'est Ă©chouĂ© face Ă la pointe de lâEurope Gibraltar. Pendant six mois, aucune solution nâa Ă©tĂ© apportĂ©e Ă lâĂ©chouage du bateau jusquâĂ ce que le 10 fĂ©vrier 2008, une tempĂȘte provoque une fuite d'hydrocarbures provenant du cargo, polluant ainsi 1,5 km de cĂŽtes espagnoles. La mĂȘme annĂ©e le Sierra Nava, navire frigorifique battant pavillon panamĂ©en, sâest Ă©chouĂ© sur une plage du sud de la baie dâAlgeciras et a contaminĂ© aux hydrocarbures 1 kilomĂštre de cĂŽtes. A ces accidents graves, il faut ajouter une pollution manifeste des eaux causĂ©e par des dĂ©gazages sauvages, les fuites liĂ©es Ă lâactivitĂ© de soutage et considĂ©rĂ©es comme frĂ©quentes par les associations Ă©cologistes, les dĂ©versements industriels de la baie dâAlgeciras et lâĂ©vacuation directe en mer des eaux usĂ©es de lâensemble des villes du dĂ©troit. 21Tous ces risques marins et cĂŽtiers sont retrouvĂ©s sur lâensemble du pourtour mĂ©diterranĂ©en oĂč le littoral subit un surinvestissement Ă©conomique industrie portuaire, tourisme, villes pluri-millionnaires, etc.. Le cas du dĂ©troit de Gibraltar nâest donc pas isolĂ©, il interpelle simplement par la suraccumulation et la fragilitĂ© visible dâun littoral rĂ©cemment classĂ© pour sa richesse Ă©cologique. Une augmentation des effets de fermeture et dâenclavement spatiaux 22Le dernier risque majeur pour les riverains du dĂ©troit est une augmentation des effets frontiĂšres ». Ces effets sont dus Ă lâexistence de flux illĂ©gaux qui traversent les territoires riverains du dĂ©troit de Gibraltar et qui obligent Ă la crĂ©ation dâune zone mirador » avec systĂšmes radar de surveillance de dĂ©troit SIVE, patrouilles renforcĂ©es, et militarisation des frontiĂšres, afin de prĂ©venir lâimmigration clandestine, le trafic de drogue, la contrebande. 23La configuration politique et gĂ©ographique du dĂ©troit, bousculĂ©e par un jeu dâenclaves stratĂ©giquement positionnĂ©es et inlassablement contestĂ©es et revendiquĂ©es, favorise lâĂ©mergence dâun courant dâĂ©change illicite. Il sâexplique dâune part par le fonctionnement Ă©conomique des enclaves de Gibraltar et de Ceuta proche de celui dâun port franc et dâautre part par le va-et-vient rĂ©gulier de travailleurs vivant dans lâarriĂšre-pays andalou ou rifain. Lâexistence de marchandises dĂ©taxĂ©es et la possibilitĂ© de les faire traverser la frontiĂšre moyennant quelques ruses et la corruption de quelques douaniers, alimentent alors rĂ©guliĂšrement un courant de contrebande. Cigarettes et alcool en provenance de Gibraltar sont aisĂ©ment retrouvĂ©s dans les rues andalouses ; quant aux Marocains, ils sont Ă la recherche dâĂ©lectromĂ©nager de tous types en provenance dâEurope. 24Ces flux marchands illĂ©gaux sont accompagnĂ©s dâune mobilitĂ© humaine clandestine stoppĂ©e par la coupure dâeau Ă franchir que reprĂ©sente le dĂ©troit et par la double barriĂšre barbelĂ©e et militarisĂ©e de la frontiĂšre de Ceuta. Ces obstacles nâarrĂȘtent Ă©videmment pas les candidats au passage vers lâEurope. Ils rĂŽdent Ă©galement aux entrĂ©es du port de Tanger Ă la recherche dâune faille dans le systĂšme de surveillance leur permettant alors dâembarquer furtivement dans un navire, sous les essieux dâun camion, dans une remorque, etc. Selon une Ă©tude du ministĂšre de lâĂ©conomie et des finances marocain 2008, 0,5 % Ă 1 % des chargements sont affectĂ©s par ces problĂšmes de sĂ»retĂ©. La migration de lâactivitĂ© roulier-passager ro-pax vers Tanger-Med, au sein dâun port hors de la ville, aux derniĂšres normes de sĂ©curitĂ©, et isolĂ© par la mer dâun cĂŽtĂ©, la montagne de lâautre, permet dâune certaine maniĂšre de remĂ©dier Ă ces difficultĂ©s. Pourtant, cette situation prĂ©sente une part de paradoxe puisque partout dans le monde lâactivitĂ© ferry est par essence la plus urbaine » des activitĂ©s portuaires. 25Enfin, dâun point de vue Ă©conomique, le pari marocain sur les zones franches nâest pas dĂ©nuĂ© de risques puisquâil favorise un mitage dĂ©fiscalisĂ© » des territoires, sans garantie de rĂ©sorber les Ă©quilibres spatiaux, et avec lâĂ©ventualitĂ© de crĂ©er une parcelle de modernitĂ© et de richesse aux intĂ©rĂȘts exclusivement extraterritoriaux Coudroy de Lille, 2007. Emergent alors le long des cĂŽtes du dĂ©troit divers Ăźlots politiques, Ă©conomiques, militaires, qui fractionnent de plus en plus des territoires dĂ©jĂ peu articulĂ©s. Le dĂ©troit de Gibraltar, un espace pertinent dâintĂ©gration territoriale ? 26Parler dâintĂ©gration territoriale sur un espace si complexe peut paraĂźtre un vĆu pieux au regard des modalitĂ©s politiques, socio-Ă©conomiques et environnementales qui viennent dâĂȘtre passĂ©es en revue. Or câest une piste Ă explorer afin dâarticuler le rĂ©seau mondial Est-Ouest dans lequel est insĂ©rĂ© le dĂ©troit et le systĂšme local Nord-Sud en demande dâopportunitĂ©s de dĂ©veloppement. Ici, en particulier, le contact fragile entre la mondialisation et ses marges est exacerbĂ© au risque de faire du dĂ©troit un simple lieu de transit dâhommes et de marchandises. Penser Ă une intĂ©gration rĂ©gionale dâun genre nouveau puisque intercontinentale et euro-africaine est alors peut-ĂȘtre une nouvelle voie du dĂ©veloppement pour les territoires marginaux et frontaliers de lâespace europĂ©en. Les efforts Ă rĂ©aliser en vue dâune intĂ©gration rĂ©gionale 27Un projet de gestion commune dâune zone transfrontaliĂšre nĂ©cessite, outre une volontĂ© politique forte et partagĂ©e, une certaine harmonie sociale, Ă©conomique et politique entre les participants. Une Ă©volution de ce type sur le dĂ©troit de Gibraltar implique alors que la rĂ©gion du TangĂ©rois effectue un vĂ©ritable rattrapage en terme de dĂ©veloppement Ă©conomique, le projet Tanger-Med se prĂ©sente comme le reflet des aspirations marocaines. Le Maroc devra Ă©galement imposer une rĂ©elle politique de rĂ©gionalisation en octroyant Ă la rĂ©gion [du Rif ou du Tangerois] une responsabilitĂ© financiĂšre accrue », car la coopĂ©ration imaginĂ©e nâest pas intergouvernementale mais bien interrĂ©gionale entre des acteurs et des territoires partageant les mĂȘmes attaches pour lâespace en question Cherkaoui, 2006. Dâautant plus que lâAndalousie voisine est une CommunautĂ© Autonome avec ses propres instances politiques, financiĂšres et lĂ©gislatives. Il est possible dâimaginer quâau sein de cet espace solidaire, les plates-formes dâĂ©clatement de Tanger-Med et Algeciras coopĂ©reraient, ce qui offrirait une capacitĂ© dâaccueil de quasi 15 millions de conteneurs pour le dĂ©troit, devenant ainsi la premiĂšre zone conteneurisĂ©e de lâespace euro-mĂ©diterranĂ©en. 28Toutefois, sans solution politique pour Ceuta et Gibraltar, le statut quo risque de sâĂ©terniser. Certains responsables espagnols accusent mĂȘme le Maroc de vouloir casser lâĂ©conomie de Ceuta avec le projet Tanger-Med. Pourtant, une cogestion de Ceuta avec le Maroc et de Gibraltar avec le Royaume-Uni est envisageable en raison de lâĂ©volution socioculturelle des enclaves. Dans ces enclaves les brassages ethniques sont plurisĂ©culaires et la proportion des rĂ©sidents marocains Ă Ceuta ou espagnols Ă Gibraltar a considĂ©rablement augmentĂ©. Yves Zurlo 2006 parle, concernant Ceuta et Melilla autre enclave espagnole au Maroc, de laboratoire de convivencia signifiant vie en commun en espagnol. Pourtant, les enclaves semblent Ă©voluer plutĂŽt vers lâautonomie politique que la gestion commune. Les obstacles Ă lâintĂ©gration 29Les obstacles Ă lâintĂ©gration sont encore de taille et ils sont Ă chercher dans les nombreux paradoxes qui Ă©mergent de la trop grande dĂ©sarticulation entre les enjeux locaux et le systĂšme mondial qui sây superposent. 30En effet, la permanence des rĂ©seaux illĂ©gaux de lâimmigration et de la contrebande est alimentĂ©e par les Ă©carts croissants de dĂ©veloppement entre les deux rives, et ces rĂ©seaux ne cessent de se dĂ©velopper malgrĂ© les stratĂ©gies sĂ©curitaires de barricadement de lâespace europĂ©en. 31Ensuite, la faveur actuelle donnĂ©e au dĂ©veloppement Ă©conomique a de nombreux effets pervers. Dâun point de vue social, le succĂšs des projets en cours est loin dâĂȘtre avĂ©rĂ© et les voies souhaitables Ă une inversion des tendances ne semblent pas celles choisies pour le moment. Dâun point de vue environnemental, il est certain que les projets en cours se sont complĂštement affranchis des normes ou des lĂ©gislations qui existent puisque une grande partie des espaces maritimes et terrestres du dĂ©troit de Gibraltar sont rĂ©glementĂ©s par des zonages de protection de niveau rĂ©gional Ă europĂ©en. 32Ces dysfonctionnements amĂšnent alors Ă la construction dâun espace paradoxal, mais Ă lâimage du monde, oĂč tout est mis en place pour la fluiditĂ© et la gestion optimale des circulations marchandes alors que sâopposent barricades, postes de contrĂŽles et lĂ©gislations discriminatoires aux mobilitĂ©s humaines. Les premiers pas vers la gestion commune 33Pourtant, le tableau nâest pas complĂštement sombre sinon il serait illusoire de rĂ©flĂ©chir Ă des perspectives dâintĂ©gration. 4 Le Marin, 4-05-07. 34Le Maroc effectue prĂšs des deux tiers de son commerce extĂ©rieur avec lâUnion EuropĂ©enne dont 22,1 % avec la France, suivie de l'Espagne 13,2 %, de l'Italie 5,9 %, de l'Allemagne 4,2 % et de la Grande-Bretagne 3,6 %4. Cette situation lui a valu dâobtenir, en 2008, un statut avancĂ© avec lâ dans le cadre de sa politique de voisinage. Il est le premier pays sud-mĂ©diterranĂ©en Ă entrer dans cette catĂ©gorie et Ă renforcer ainsi ses liens politiques et Ă©conomiques avec lâUE dans lâobjectif dâintĂ©grer Ă terme le marchĂ© unique europĂ©en. Il est, en particulier, un partenaire politique privilĂ©giĂ© de lâEspagne puisquâils sont souvent obligĂ©s de coopĂ©rer en matiĂšre de gestion des flux migratoires. De 1956 Ă 2004, soit en 50 ans de relations de voisinage, lâEspagne et le Maroc ont signĂ© 104 accords dont plus dâun tiers concernent le dĂ©troit de Gibraltar, les modalitĂ©s de circulation des personnes et la coopĂ©ration entre les autoritĂ©s de frontiĂšres RamĂłn Remacha, 2006. Cette consolidation des liens euro-chĂ©rifiens est un prĂ©alable Ă une coopĂ©ration plus Ă©troite de type intĂ©gration frontaliĂšre entre le TangĂ©rois et lâAndalousie. Ces rĂ©gions auraient incontestablement un rĂŽle Ă jouer dans une politique de voisinage encore plus Ă©troite avec le Maroc, ne serait-ce que dans la rĂ©ception et la gestion du flux commercial. Une telle situation serait bĂ©nĂ©fique Ă une massification des trafics et Ă une extension des arriĂšre-pays des ports de Tanger-Med et dâAlgeciras. 35Enfin, Ă lâĂ©chelle rĂ©gionale, ce sont les questions environnementales qui ont connu les avancĂ©es les plus significatives. En effet, le 25 octobre 2006, lâUNESCO a approuvĂ© le premier projet de RĂ©serve de BiosphĂšre Intercontinentale, proposĂ© par les comitĂ©s MaB Man and Biosphere de la rĂ©gion Andalousie et du royaume du Maroc. Le territoire proposĂ©, dâune superficie dâun million dâhectares, est dĂ©terminĂ© sur la base du large espace de communication entre le continent europĂ©en et le continent africain, constituĂ© par le sud de lâAndalousie et le nord du Maroc, englobant donc tout le dĂ©troit de Gibraltar et les nombreux parcs naturels, rĂ©serves naturelles, monumentos naturales, et sites dâintĂ©rĂȘts biologiques et Ă©cologiques des deux rives. La gestion commune de tous ces espaces protĂ©gĂ©es favorise une politique commune de conservation et dâusage des ressources naturelles, premiers pas communs vers une intĂ©gration rĂ©gionale des territoires frontaliers du dĂ©troit de Gibraltar. Conclusion 36Le dĂ©troit de Gibraltar est traversĂ© par des flux et des influences multiples, parfois opposĂ©s, qui en font un espace original dâobservation de la mondialisation et de ses effets sur les territoires. Lâespace en question rĂ©vĂšle aujourdâhui une offre de transport renouvelĂ©e et moderne qui permet une intĂ©gration des territoires riverains aux rĂ©seaux du transport mondial. Cependant, la faible articulation entre les logiques commerciales dâune part et les intĂ©rĂȘts Ă©conomiques et sociaux locaux dâautre part laisse entrevoir certaines frictions territoriales capables de fragiliser lâespace en construction. Sâoppose alors sur ce territoire un espace de la fluiditĂ© entretenu par des intĂ©rĂȘts extĂ©rieurs, celui des flux Est-Ouest, et un espace de la fixitĂ© aux rĂ©alitĂ©s multi-scalaires et imposĂ© par les difficultĂ©s de la relation Nord-Sud Hesse et Rodrigue, 2004. Les tensions engendrĂ©es par la fragilitĂ© du territoire invitent alors Ă une rĂ©flexion sur une coopĂ©ration et une solidaritĂ© entre les deux rives afin de dĂ©passer les difficultĂ©s liĂ©es Ă la fragmentation spatiale de ce terraquĂ©. 37Unir les deux rives dâun dĂ©troit par une coopĂ©ration transfrontaliĂšre est un systĂšme qui a dĂ©jĂ fait ses preuves depuis 1997 sur les rivages de lâĂresund et qui est Ă lâĂ©tude sur le Pas de Calais programme europĂ©en Interreg IVA France Manche â Angleterre. La difficultĂ© de ce genre de projets rĂ©side dans le fait que les rivages dâun dĂ©troit sont souvent isolĂ©s par la coupure dâeau qui sâoppose Ă leur mise en contact. En recentrant les enjeux sur la gestion de cette coupure dâeau, ils font alors de la mer le support de lâespace en construction. De sĂ©paratrice la mer devient intĂ©gratrice, animant ainsi le terraquĂ© quâelle a formĂ©. Sur lâĂresund comme sur le Pas de Calais, les deux rives sont dorĂ©navant unies par un lien fixe. Projet qui existe sur le dĂ©troit de Gibraltar depuis 1869, preuve dâune volontĂ© ancienne de lier les deux rives, et pour lequel des Ă©tudes de faisabilitĂ© ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©es au cours des dĂ©cennies 1980 et 1990. Mais cette union euro-africaine prĂȘte encore Ă controverse, Ă lâheure dâune Europe de plus en plus protectrice Ă lâĂ©gard de ses frontiĂšres extĂ©rieures. Parcourezle dĂ©troit de Gibraltar en bateau pour observer trois espĂšces de dauphin dans leur habitat naturel. Vous ĂȘtes presque sĂ»r de les voir ! Grimpez au sommet du rocher en tĂ©lĂ©phĂ©rique pour profiter de vues imprenables sur la zone. Ă propos de cette activitĂ©. Annulation gratuite Annulation jusquâĂ 24 heures Ă lâavance pour un remboursement intĂ©gral RĂ©servez maintenant DETROIT DE GIBRALTAR / MIGRANTS â LâUnion EuropĂ©enne et le Royaume du Maroc se sont mis dâaccord pour financer la construction dâun pont au niveau du DĂ©troit de Gibraltar afin de relier lâEurope et lâAfrique ce sera le âViaduc de Gibraltarâ. Lâobjectif consiste Ă sĂ©curiser ce point de passage des migrants tout en crĂ©ant une liaison terrestre directe entre lâEurope occidentale et lâAfrique. Le viaduc de Gibraltar, long de 14km et dont la construction dĂ©butera en 2024, permettra de relier lâEurope au Maroc par voie terrestre en seulement 1/4h ! Le DĂ©troit de Gibraltar sĂ©pare lâEspagne du Maroc. Il sâagit du seul point de passage maritime entre lâocĂ©an Atlantique et la mer MĂ©diterranĂ©e. Il est trĂšs frĂ©quentĂ© avec plus de navires qui le franchissent chaque annĂ©e. Mais le DĂ©troit de Gibraltar ne constitue pas quâun point de passage maritime puisquâil sâagit de la principale route utilisĂ©e par les migrants pour rejoindre lâEurope. Et pour cause, cette traversĂ©e en jet ski ou petit bateau Ă moteur ne dure quâune vingtaine de minutes et se prĂ©sente comme beaucoup moins dangereuse que le passage de la Libye Ă lâItalie. Toutefois, de nombreux migrants meurent chaque semaine durant cette traversĂ©e, en raison dâembarcations prĂ©caires ou surchargĂ©es qui sâĂ©chouent, ou encore parce quâils tentent une traversĂ©e Ă la nage Ă©puisante qui dure plus de 5 heures. Câest pourquoi lâUnion EuropĂ©enne et le Royaume du Maroc ont trouvĂ© un accord, ce vendredi 4 mai 2018, afin de sĂ©curiser ce point de passage des migrants. Pour ce faire, la rĂ©flexion a rapidement abouti Ă lâidĂ©e de crĂ©er un viaduc qui reliera Tarifa Espagne Ă Eddalya Maroc, distantes de 14 km. Si les villes de Tarifa et Eddalya ont Ă©tĂ© choisies pour la construction de ce pont, câest en raison de leur proximitĂ© gĂ©ographique il sâagit des 2 extrĂ©mitĂ©s les plus proches entre lâEspagne et le Maroc 14km seulement. Dâailleurs, Tarifa est le point dâarrivĂ©e EuropĂ©en plĂ©biscitĂ© par les migrants. La construction du âViaduc de Gibraltarâ, entre Tarifa et Eddalya, dĂ©butera dans le courant de lâannĂ©e 2024 si tout va bien. Le temps que les plans du projet, confiĂ©s au cĂ©lĂšbre cabinet dâarchitecte marocain âSiana-Najiâ, soient dessinĂ©s et validĂ©s conjointement par lâEurope et le Maroc. GrĂące Ă ce viaduc, lâEurope et le Maroc veulent sĂ©curiser les dĂ©placements des migrants, comme nous le confie Peter Kaulfe, directeur du cabinet des relations internationales de lâUnion EuropĂ©enne âLe viaduc de Gibraltar vise Ă permettre aux migrants dâarriver en Europe sans risquer leur vie. Ce viaduc permettra par ailleurs Ă la police aux frontiĂšres espagnole de mieux contrĂŽler les flux de migrants en distinguant ceux qui pourront ĂȘtre acceptĂ©s sur le territoire EuropĂ©en de ceux qui devront ĂȘtre expulsĂ©s.â La construction de ce viaduc devrait durer 2 ans, avec un dĂ©but des travaux en 2024. Le coĂ»t total prĂ©visionnel de lâouvrage sâĂ©lĂšve Ă 950 millions dâeuros âNous avons budgĂ©tisĂ© 950 millions dâeuros pour la construction du viaduc de Gibraltar, la moitiĂ© Ă©tant financĂ©e par le Maroc et lâautre moitiĂ© par lâUnion EuropĂ©enne. Nous souhaitons un pont fonctionnel qui se fonde dans son environnement. La dimension Ă©cologique de ce projet est essentielle, tout en ne perturbant nullement le trafic maritimeâ explique P. Kaulfe. Mais ce viaduc ne prĂ©sente pas quâun intĂ©rĂȘt pour les migrants puisquâil pourra ĂȘtre empruntĂ© par nâimporte quel quidam âCe viaduc sera composĂ© de 2 fois 2 voies de circulation sĂ©parĂ©es par un terre-plein central large de 15 mĂštres sur lequel passeront les piĂ©tons et cyclistes. Ainsi, on pourra rejoindre lâAfrique depuis lâEurope et vice-versa en seulement 1/4 heure environ avec un vĂ©hicule.â Si la traversĂ©e des piĂ©tons et cyclistes sur le viaduc de Gibraltar sera gratuite, le passage des vĂ©hicules motorisĂ©s sera quant Ă lui payant âLa dimension Ă©cologique du projet veut que la traversĂ©e soit gratuite pour les piĂ©tons et cyclistes. Toutefois, nous allons instaurer un pĂ©age, dont le montant dĂ©pendra du gabarit du vĂ©hicule, pour tous les vĂ©hicules motorisĂ©s.â Ce viaduc de Gibraltar, long de 14km entre lâEurope et lâAfrique, aura le mĂ©rite non seulement de sĂ©curiser les flux de migrants mais aussi de faciliter lâaccĂšs de lâEurope Ă lâAfrique en voiture en quelques minutes seulement. Toutefois, ce nouveau viaduc ne constituera pas le plus long pont dâEurope puisque le Pont Vasco de Gama, au Portugal mesure plus de 17km de long ! Les Ă©changes entre lâEurope et lâAfrique seront donc facilitĂ©s et lâĂ©conomie du Maroc a des chances de connaĂźtre un fort dĂ©veloppement grĂące au futur viaduc de Gibraltar ! viaduc de Gibraltar verra le jour dĂšs 20242018-05-05T152519+0200ludovicInternationaleddalya,europe,gibraltar,maroc,tarifa,union europĂ©enne,viaduc,viaduc de gibraltarDETROIT DE GIBRALTAR / MIGRANTS - L'Union EuropĂ©enne et le Royaume du Maroc se sont mis d'accord pour financer la construction d'un pont au niveau du DĂ©troit de Gibraltar afin de relier l'Europe et l'Afrique ce sera le 'Viaduc de Gibraltar'. L'objectif consiste Ă sĂ©curiser ce point de... lapinmalin25 sozRQ5.